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Interview paru dans la Ruche, news n°3, avril 2008

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« On ne peut poser que des questions, c’est cela qui fait avancer » Pascal Boëls.

 

boels1Donnant de nombreux concerts en France et à l'étranger et professeur à la Schola Cantorum, Pascal Boëls, est considéré comme l'un des meilleurs spécialistes de la guitare à 10 cordes. Nous l’avons rencontré lors d’un de ses concerts à Dunkerque  et c’est avec plaisir que quelques jours plus tard nous avons pu assister à une master-class que cet amoureux de Bach animait avec passion et un grand souci de pédagogie…

 

 

Vous êtes un ancien élève des Dunes. Quel fut votre parcours scolaire?

P. BOËLS : J’ai passé aux Dunes trois années apparemment conventionnelles, de la seconde à la terminale (promo 1972), mais étais déjà en quelque sorte « brûlé » par la Musique. Un curieux parcours du combattant s’est instauré, surtout en terminale, entre le bac officiel et le Bach dessous la table.

 

Un personnage vous a-t-il marqué au cours de votre scolarité?

P. BOËLS : Parmi les professeurs, Sœur Marie-Marthe, professeur de français, maintenant disparue, personne de grande culture et de petite taille, haute en couleurs, prêtant le flanc à une caricature « bon enfant » dont nous nous régalions sans nous rendre compte de la perle qui nous était offerte. Egalement M. Babelaere, professeur d’Allemand, alliant hauteur de vue et autorité naturelle et bienveillante, passionné par la Musique, pratiquant le piano et l’orgue de Bach. Mais aussi le père Paul Crépin, homme de théâtre et violoniste à la sensibilité exacerbée, s’extasiant de la même manière pour Claudel, Chaplin, Mozart ou Beethoven.

Tout cela a vivement contribué à élargir mon horizon.  

 
Avec le recul, la formation dispensée vous a-t-elle été utile?

P. BOËLS : Bien sûr, globalement, même si la nourriture que je recherchais circulait surtout de façon souterraine ; l’école offre une telle chance quant aux possibilités de dépassement et d’ouverture au monde.

 

Votre parcours professionnel fut-il selon vous atypique ou conventionnel?

P. BOËLS : Tout parcours artistique est obligatoirement atypique et doit s’imposer avec une telle évidence que la question du choix ne se pose pas ; dans le cas contraire il faut toujours se diriger vers l’autre solution.

 

Les rencontres les plus importantes que vous avez pu faire

P. BOËLS : Cela a commencé à Dunkerque, avec la rencontre marquante et passionnée du rivage, image on ne peut plus appropriée du grand large intérieur. J’aime beaucoup cette phrase de Maurice Blondel : « Il n’y a pas plus contemporain que ce qui est éternel »; dès lors sont toujours actuels pour moi le chant grégorien, Bach, Mozart -cadeaux proprement miraculeux- mais aussi Scarlatti, Chopin et Debussy, sans oublier Schubert et quelques autres…

 

Quel fut le plus beau et le pire moment de ce parcours ?

P. BOËLS : En tant que musicien, je suis très sensible à la réponse du lieu. Les moments les moins agréables sont souvent liés à ces lieux sans âme, à l’acoustique aseptisée, et qui contribuent à tuer la Musique. Mais les meilleurs moments sont également nombreux…peut-boels3être la rencontre et la présence de Maurice Ohana lors d’un concert que j’avais donnée en 1992 à la Schola Cantorum où j’avais joué entre autres ses « Trois Graphiques » pour guitare et orchestre. Ce lieu -qui avait vu naître, en 1954, le premier enregistrement médiatique de ce grand compositeur- bouclait mystérieusement la boucle car Ohana disparut quelques mois plus tard ; j’espère que mon interprétation n’y était pour rien ! Un exemple plus récent peut-être est le souvenir d’un récital donné en 2006 dans la basilique de Paray-Le-Monial, par un temps froid et gris. J’y avais interprété entre autres le XVIe siècle espagnol et la Chaconne de Bach, mais l’on m’avait demandé in extremis du Mozart en cette année anniversaire ; j’avais choisi un adagio extraordinairement séraphique (K.356) composé en 1791 par Mozart en sa dernière année ; de tels lieux sont bien sûr particulièrement marquants et la communion qui peut s’y produire ne nous appartient pas ; toujours est-il qu’il a neigé abondamment durant le concert et que la surprise a été totale à sa sortie. Nous étions dans un autre monde et j’ai toujours pensé que Mozart y était pour quelque chose…

 

Vous sentez-vous bien dans notre époque? Qu'en attendez-vous? Comment la jugez-vous?

P. BOËLS : Toute époque est par définition transitoire ; à en oublier à ce point le fondement de certaines racines, l’on risque de basculer dans un paganisme et une barbarie sans précédent. Mais la mutation si inédite que nous vivons nous réservera peut-être d’heureuses surprises.

 

Que diriez-vous à de jeunes lycéens qui s'interrogent sur leur avenir?

P. BOËLS : De préserver surtout leur capacité d’émerveillement.

 

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Pascal Boëls a enregistré plusieurs disques. Citons le dernier: Domenico Scarlatti : 15 sonates pour guitare à 10 cordes, paru chez Calliope (référence 3 Suites BWV. 995, 997, 1012 CAL.9385)

 distribué par Harmonia Mundi) ou le suivant, un disque de Bach, à paraître début 2008, toujours chez Calliope.
 

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