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Interview paru dans  la Ruche n°9, juin 2002

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Edith Varet a correspondu par mail pour la Ruche avec Valentine Ammeux , installée en Chine pour le meilleur et surtout pas pour le pire

 La Ruche : Qui êtes-vous?

Je suis professeur de français en Chine. J’ai 27 ans. Je suis originaire de Dunkerque. Mon père travaille à Sollac et ma mère est professeur au collège Fénelon, à Malo. J’ai deux sœurs : Anne-Lise (31 ans) qui vit aux Etats-Unis et Juliette (28 ans) qui vit à Montpellier. De mon côté, je me suis mariée le 13 avril dernier, en Chine, avec Christophe, rencontré sur les rives du Yangtsé. J’ai quitté la France en septembre 2000 pour vivre ce qui me tenait à cœur : partager

La Ruche : Vous êtes une ancienne élève des Dunes. Quel fut votre parcours scolaire

Je n’ai jamais été une élève brillante. Je me satisfaisais toujours d’une petite moyenne, tout juste confortable. J’étais au collège à Fénelon et je ne suis arrivée aux Dunes qu’en seconde. Ces années aux Dunes se résument pour moi en un grand éclat de rire. Je me suis beaucoup, beaucoup amusée et j’y ai crée des amitiés qui durent encore aujourd’hui.

Ces années ont été pour moi celles de l’épanouissement social et spirituel. En plus de ces amitiés grandissantes, j’ai pris le temps de m’engager dans l’Eglise, en faisant du MEJ (Mouvement Eucharistique des jeunes). J’ai aussi un peu côtoyé l’aumônerie, mais cela ne me satisfaisait pas : je ne voulais pas mélanger les Dunes et la foi. Il y avait d’un côté l’amusement et les copains ; de l’autre, mon questionnement spirituel. Deux mondes que je ne voulais pas trop mélanger.

Quant aux études, c’était un peu moins effervescent : j’ai fait deux secondes (un choix que je n’ai jamais regretté : j’avais besoin de prendre mon temps à cette période là de ma vie), une première et terminale B (économie). J’ai obtenu mon bac avec une mention AB, malgré un 3/20 en philo. J’étais totalement hors-sujet (j’ai demandé à lire ma copie corrigée). Ce qui m’a sauvée : mes 20 points d’avance du bac français...

 

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Mon bac en poche, je suis entrée en Hypokhâgne Scientifique à Lille. J’ai embrayé sur la Khâgne. Deux années bien moins rigolotes que ces années aux Dunes. C’est là que j’ai appris à travailler ! Comme quoi, tout vient à temps… Après ces deux années intellectuellement et physiquement éprouvantes, j’ai rejoint les bancs de la fac pour faire une licence puis une maîtrise de Lettres modernes, que j’ai obtenue avec une mention très-bien.

Au cours de mon année de maîtrise, je ne suis pas allée à la fac. J’avais décidé de vivre ce qui me tenait tant à cœur depuis des années : partir vivre à l’Arche. L’Arche est une association internationale qui accueille des adultes handicapés mentaux. La vie y est communautaire, répartie dans des maisons où 8 personnes habitent : 5 personnes handicapées et trois assistants. Cela veut donc dire que nous vivions comme une vraie famille, avec nos occupations quotidiennes : travail, études mais aussi cuisine et ménage. Chacun, handicapé ou non, est responsable de la bonne marche de la communauté. Je suis donc partie y vivre une année, au Pays de Galles. J’étais responsable du centre d’aide au travail (CAT) qui permettait aux personnes les plus fragiles de travailler en fabriquant artisanalement des bougies, que nous commercialisions ensuite. En rentrant de ces mois riches de rencontres et d’aventures humaines, j’ai obtenu ma maîtrise. J’avais réalisé mon premier rêve.

La même année, j’ai passé le concours de l’Ecole de Journalisme de Lille (l’ESJ). A grande surprise, je l’ai eu ! J’ai donc réalisé mon deuxième rêve : devenir journaliste.

Après ces quelques mois d’études, j’ai travaillé à Toulouse. J’étais chef d’édition : une grosse charge de travail mais très formatrice. De la photo à la PAO, en passant par la gestion d’un réseaux de correspondants ou l’écriture sous pression : je me suis fait la main !  J’avais alors 25 ans et je voulais à tous prix réaliser mon troisième et dernier rêve d’adolescente  : partir en coopération dans un pays pauvre.

J’ai donc donné ma démission en août 2000 pour partir enseigner le français et la presse à l’université de Xiamen, en Chine, juste en face de Taiwan. J’enseigne aux niveaux licence, maîtrise et DEA. Mes étudiants sont spécialistes de français et j’essaye d’être une prof sympa… qui ne met pas trop de mauvaises notes !

C’est en Chine que j’ai rencontré l’homme de ma vie. Christophe est aussi français et travaille au Consulat de France de Wuhan, au centre de la Chine.  J’ai donc déménagé et quitté mon poste pour le rejoindre. Je continue à travailler dans le même domaine. Nous nous sommes mariés le 13 avril dernier, dans un petit temple Ming, sur les rives du Yangtsé. Avant de célébrer notre mariage religieux, le 30 août à Bollezeele.

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La Ruche: Un personnage, professeur ou autre vous a-t-il marqué au cours de votre scolarité? Dans quelles circonstances?

Beaucoup de professeurs m’ont marquée. Je me souviens de chacun d’eux et je pense encore parfois à eux. Je me souviens de Madame Germe pour sa patience, Madame Morel pour sa gentillesse, Monsieur Leclercq pour les parties de rire en cours, Monsieur Ettahiri parce qu’il m’a une fois rajouté un 1 devant un 5/20. Mais je pourrais aussi parler de Madame Dhoine, Mademoiselle Bordelier, Mademoiselle Briche, Madame Weil, Mademoiselle Brown, Monsieur Mouret… peut-être des professeurs qui sont encore là aujourd’hui ?

Je pense qu’entre tous, celui qui m’a le plus marqué est Pierre Turlure. Il était mon professeur de français en première. C’est lui qui m’a permis de découvrir et d’aimer la littérature et de trouver ma voie. Il a éveillé en moi ma fibre littéraire, encore en sommeil à cette époque là. C’est grâce à lui que j’ai eu 17 à l’écrit du bac de français, que je me suis lancée dans les classes préparatoires littéraires (il m’avait fait une super appréciation sur mon dossier) et fait une maîtrise de lettres. Il m’a aussi aidé à développer mon esprit critique et à m’ouvrir sur des questions que je ne me posais alors pas : pourquoi je vis ? Quel est le sens d’une existence ? Des questions fondamentales que le côté " boîte à bac pour élèves travailleurs " qu’était ( sont ?) Les Dunes d’alors ne cherchait pas à creuser. Le lycée des Dunes était une usine à " bons petits soldats " où, pour beaucoup, seul le bac comptait. M. Turlure a en fait changé le cours de mon existence.

 

Votre meilleur ou votre pire moment aux Dunes?

Pire : je ne me souviens pas. Le meilleur : tous les jours, parce que je savais que j’allais m’amuser !!!


Avec le recul, la formation dispensée vous a-t-elle été utile?
Sans doute… Mais je crois que l’on ne nous ouvrait pas assez les voies de l’enseignement supérieur. Le discours était souvent : bon en math, physique = école d’ingénieur à Lille ; parfois école de commerce… mais en dehors de cela, point de salut !

On ne parlait pas d’autres modes de vie, d’autres façons de penser et de vivre. On manquait d’ouverture sur le monde, je trouve.

Votre parcours professionnel

Atypique ou conventionnel?
Pourquoi ce choix?

J’ai déjà répondu à cette rubrique auparavant. Je crois que mon parcours est un peu atypique, sans pour autant être illogique ou excentrique. J’ai toujours été guidée par ce qui me faisait vibrer et j’ai eu la chance de pouvoir suivre mes intuitions de bonheur. Mes parents ne m’ont jamais mis de bâtons dans les roues et en regardant les dix dernières années écoulées, je n’ai aucun regret !!

Je crois que j’ai pas mal slalomé entre les difficultés… mais j’ai aussi une très bonne étoile qui m’a toujours aidée à retomber sur mes pieds. Je pense que mon insouciance me protège !

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Vous sentez-vous bien dans notre époque? Qu'en attendez-vous? Comment la jugez-vous?

Je me sens très bien dans mon corps et dans mon cœur. J’aime ce temps qui passe et que j’essaie de vivre au maximum.

En regardant, via TV5, les nouvelles de France, je trouve toujours les Français un peu égoïstes. Ils ne réalisent pas toujours que la France est un tout petit pays où il suffirait juste d’un peu plus d’amour du prochain pour que cela soit un mini-paradis. Mais, c’est le discours que tous ceux qui vivent dans un pays en voie de développement tiennent… et on ne peut pas entendre cela si on ne l’a pas constaté par soi-même.

 

 

 

 Que diriez-vous à de jeunes lycéens qui s'interrogent sur leur avenir?

Je crois que le plus important est d’exercer son œil et son cœur à voir les détails positifs de la vie. Souriez, tout simplement ; le reste suivra tout naturellement. Tout le monde se pose des questions, c’est important. Sachez donc choisir vos amis et donner tout ce que vous pouvez à ceux qui vous entourent.

L’incertitude est toujours angoissante, mais elle est aussi un moteur pour aller plus loin. Si c’est trop dur, il ne faut pas s’enliser. Riez de vous-même et des autres (gentiment, bien sûr) et la vie sera plus facile. Les mauvais moments ne durent jamais éternellement et quelques années plus tard, ils sont souvent devenus de vagues souvenirs un peu étranges.

Pour ceux qui ont la foi, je leur dirai de croire que Dieu ne les abandonnera jamais et qu’il offre à tous l’Espérance pour construire une vie dense et constructive.

Mon dieu, je parle comme une vieille ou une bonne sœur… Ce que je ne suis pas tout !!

Interview de la Ruche n°9, juin 2002: Valentine Ammeux
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